StereoptiK
- création et interprétation Jean-Baptiste Maillet et Romain Bermond
Entretien Stereoptik
Jean Baptiste Maillet, Romain Bermond, pouvez-vous nous raconter les étapes qui ont conduit à la création du projet de la compagnie Stéréoptik ?
Nous sommes tous deux plasticien et musicien, mais c'est par le biais de la musique que nous nous sommes rencontrés. Durant 6 ans nous avons joué dans une fanfare Funk où Romain était à la grosse caisse, et Jean-Baptiste à la caisse claire. Ce travail rythmique nous a beaucoup aidé par la suite, tant dans la création que dans l'interprétation de nos spectacles. Et un jour nous avons eu envie de créer un spectacle (notre premier) où nous pouvions raconter une histoire en mélangeant tout ce que nous aimions : dessin, peinture, musique. Nous avions des feuilles de papier, des crayons, des fusains, des sacs plastique, des cartons… Cette façon de faire est devenue notre marque de fabrique, des matériaux simples et une approche artisanale de la création.
De quoi en quelques mots, parlent les histoires de Stéréoptik, et Dark Circus ? Comment qualifieriez vous votre univers ?
Dans Stereoptik nous suivons deux silhouettes qui partent en voyage, croisant sur leur chemin une chanteuse qui se fait enlever par des extraterrestres. Dark Circus parle d’un cirque ou tous les numéros se terminent mal, jusqu'a l'arrivée d'un jongleur qui va changer le cours de l'histoire. Nous développons un univers qui est poétique, drôle, onirique, et s'adresse à toutes et à tous.
Comment ces deux spectacles joués à la Criée s'inscrivent-ils dans votre parcours et parmi vos autres projets ?
Au cours des huit années évoulées depuis les débuts de la compagnie, nous avons créée quatre spectacles. Nous avons choisi de jouer à la Criée notre premier (Stéréoptik), et notre dernier spectacle (Dark Circus), ce qui permettra à celles et ceux des spectateurs qui pourront venir aux deux de voir ainsi l'évolution de notre travail.
Votre théâtre est un théâtre narratif qui passe par le dessin ou les figures découpées : quel rapport ce théâtre entretient-il par rapport au texte ?
Nos trois premiers spectacles sont non-textuels. Dans notre dernière création, Dark Circus, il y a quelques phrases pré-enregistrées. Il s'agit de la voix du Monsieur Loyal qui présente chaque numéros. C'est un personnage récurrent qui rythme le spectacle, comme c’est le cas au cirque.
Votre théâtre est aussi tourné résolument vers les arts graphiques : comment envisagez-vous sinon le "dialogue", du moins la relation entre ces disciplines que sont les arts graphiques, la musique, les arts de la scène ?
Nous utilisons différentes techniques de dessin, qui sont assemblées entre elles à la manière d'un film qui serait monté tantôt avec des noir et blanc, tantôt de la couleur, des détails, des travellings, des zooms… La plupart de ces dessins sont réalisés en direct, ce qui permet de donner à voir au public leur construction. Nous avons conçu ces dessins de manière à ce que l'on découvre le plus tard possible ce qu'ils représentent : le public va s’interroger, puis découvrir où va ce trait, que devient cette tache… Le rapport à la musique est très précis, il n'y a pas d' « accompagnement» à proprement parler, mais plutôt une partition à quatre mains jouée ensemble.
On sent bien dans Stéréoptik quelle inspiration a dû fournir le cinéma ou la bande dessinée. En quoi votre proposition est-elle malgré tout une proposition de théâtre ? Quelles sont vos inspirations ?
A gauche de la scène le pôle musique, à droite la table à dessin, au milieu un écran de cinéma. Le spectateur a une liberté de regard. Il peut observer comment sont créées les images et les sons, ou regarder le résultat projeté sur l'écran. Nous construisons tout à deux: dessins, décors, mais aussi nos marionnettes, en cartons. Ce sont eux nos comédiens, que nous devons apprendre à manipuler pour leur donner vie. Quant à nos inspirations, elles sont multiples: exposition, disques, spectacles, cinéma, livres, expériences scientifiques… c’est plutôt une multitude de propositions qui nous interpellent, souvent de manière inattendue.
Vos spectacles sont faits de dessins ou de création graphique réalisées à la vue du public. En outre dans une séquence de Stéréoptik, l’action se déroule sur une bande de 35 mètres de long qui sert de décor. C'est important pour vous cette idée de continuité dans le spectacle, d’artisanat ?
Le décor déroulant est une des séquence d’environ 5 minutes de Stéréoptik. Il nous permet de créer du mouvement. On retrouve cette forme de continuité narrative dans plusieurs œuvres célèbres: la tapisserie de Bayeux, les décors déroulants utilisés au théâtre autrefois, ou ceux que Méliès utilise dans ses films… Nous n'utilisons aucune technologie sur scène. Pas d'ordinateur, de palette graphique ou autres. Nous avons le sentiment qu'une part de l'émotion ressentie par les spectateurs vient du fait des matériaux simples que nous utilisons. Nos outils sont à la portée de tous.
Votre compagnie est basée en région Centre. Avez-vous déjà joué au Théâtre de la Criée ? Quel regard portez-vous sur ce centre dramatique national et sur sa région ?
Nous n'avons encore jamais joué à Marseille, et nous sommes très heureux de venir y présenter nos spectacles. En outre, c'est pour nous une émotion particulière, car Marseille et sa région est le berceau de nos deux familles. Fuveau pour Romain Bermond, et Saint-Antoine pour Jean-Baptiste Maillet dont le grand père, Pierre Graille, était santonnier. Nous venons donc jouer dans notre ville de cœur !
Propos recueillis par Etienne Leterrier, mars 2016.
En présence des artistes.